Cass. Civ. 3ème, 22 octobre 2015 n°14-20.096
Le preneur à bail commercial a conclu avec une banque, un compromis de cession de droit au bail sous diverses conditions suspensives et notamment sous la condition suspensive, stipulée dans le seul intérêt du bénéficiaire du compromis, de la signature d’un bail commercial concomitamment à l’acte de cession réitéré, dont les conditions doivent être arrêtées au plus tard le 15 septembre 2015.
Les négociations du projet de bail ont toutefois perduré après le 15 septembre 2015 (alors que le bailleur avait donné son accord sur la cession le 31 juillet 2012). Le 15 janvier 2013, le cédant a invité le bénéficiaire du compromis à signer l’acte de cession réitéré mais le bénéficiaire ne s’est pas présenté et a invoqué la caducité du compromis de cession.
Le cédant a alors assigné le cessionnaire en vue de voir déclarer la vente parfaite.
En appel, la Cour a considéré que la condition suspensive incriminée n’avait pas été réalisée et que par conséquent le compromis de cession était devenu caduque.
La Cour de cassation casse l’arrêt d’appel sur le fondement de l’article 1168 du code civil, au motif que la « condition suspensive » incriminée portait sur un élément essentiel de la formation du contrat de cession et devait en conséquence être réputée non-écrite.
Cette décision peut paraitre surprenante, des conditions suspensives de conclusions d’un nouveau bail étant très souvent stipulées dans les compromis de cession d’une part et la problématique semblant d’avantage porter sur une éventuelle renonciation du cessionnaire au bénéfice de ladite condition.
Elle s’explique semble-t-il par la rédaction spécifique de cette condition (qui ne précisait pas les spécificités du nouveau bail) et l’enchainement particulier des faits :
En effet, pour qu’il y ait cession de bail, cela présuppose qu’existe un bail à céder, ce qui était bien le cas en l’espèce. Par ailleurs, le bailleur ayant donné son accord sans réserve à la cession (31 juillet 2012), il n’y avait plus lieu de s’en préoccuper.
Aussi mettre en condition suspensive la conclusion d’un autre bail sans préciser en quoi ce nouveau bail devait différer du bail existant consistait à mettre en condition un élément essentiel du contrat de cession ce que la Cour de cassation répute non-écrit.
Il est en effet traditionnel de considérer qu’une condition ne peut porter sur un élément essentiel du contrat (cela affecterait la validité du contrat lui-même) mais seulement sur un élément futur et incertain dont dépend la formation du contrat, cet effet résultant de la seule volonté des parties.